Le riz touche des
milliers pour ne pas dire des millions d’individus en plus des riziculteurs. En
amont des sites de production, on compte les producteurs et fabricants
d’intrants (semences, engrais, pesticides), d’équipements et les négociants qui
les commercialisent. En aval de la production, se trouvent les transformateurs,
commerçants, grossistes, détaillants et consommateurs.
Matty Demont est
agro-économiste à la station du Sahel d’AfricaRice. « Les Sénégalais consomment
principalement du riz importé et pourquoi ? » se demande-t-il. « La réponse
doit être liée aux chaînes de valeurs au Sénégal et cela nous donnera des
indications sur l’orientation à donner à la stratégie rizicole destinée aux
bénéficiaires finaux – en rendant les chaînes plus orientées vers le
consommateur ».
La grande majorité
des Sénégalais consomment du riz importé. Cette préférence est influencée en
grande partie par le fait que le riz produit localement – notamment dans la
vallée du fleuve Sénégal (VFS) au Nord – a été traditionnellement de qualité
médiocre comprenant des mélanges de variétés, une qualité de grain hétérogène
avec un niveau d’impuretés inacceptable.
Que se passerait-il
si ce riz était adapté aux préférences du marché en termes de qualité et de
présentation, les populations l’achèteraient-ils ? Par un système de ventes aux
enchères expérimentales et du riz local étiqueté (Rival – une marque déposée de
riz produit localement et commercialisée par la Plateforme d’appui aux
initiatives du nord, PINORD), Demont et son équipe ont trouvé que les consommatrices
étaient prêtes à payer un supplément pour Rival équivalent de près du double de
ce qu’elles paieraient pour le riz importé (38 % cf. 16 %).
En somme, près de
20 % des participants ont préféré le riz conventionnel VFS. « L’implication
politique est la suivante ; nous ne devons pas imposer que tout le riz de la
VFS fasse l’objet de la démarche qualité », a déclaré Demont.
« Il existe un
segment du marché qui n’est pas prêt à payer pour la qualité. Le développement
de la chaîne de valeur devra s’assurer que le riz VFS conventionnel reste
disponible pour ces consommateurs si l’amélioration de sa qualité implique des
prix plus élevés ».
Les acquis
principaux issus des travaux sur la chaîne de valeur menés dans la station du
Sahel sont les suivants : la disponibilité du riz local de qualité (VFS) doit
être promue au sein de la population, la production de riz de qualité demande
des investissements, et les politiques rizicoles doivent être séquencées – en
commençant par augmenter la qualité du riz local pour atteindre le niveau de
celui importé, ce qui valorise le produit, produire du riz à grande échelle, et
mettre en place des programmes promotionnels en vue de commercialiser
l’excédent pour le substituer au riz importé sur les marchés urbains.
Un article“Policy
Sequencing and the Development of Rice Value Chains in Senegal” par Dr Matty
Demont et Amy C. Rizzotto, publié ce mois dans “Development Policy Review” met
l’accent sur cette question.