Friday, July 3, 2020

Faire face à la Covid-19 dans les hautes terres de Madagascar: Comment s’adaptent les ménages et les femmes dans les zones rurales ?


Contribution de Gaudiose Mujawamariya, experte de la chaîne de valeur du riz et point focal Genre, et Irina Andrianina Tefy, assistante de recherche, Programme Politique, Systèmes d'Innovation et Évaluation d’impact d'AfricaRice

Au début du mois de mars 2020, alors que le monde était de plus en plus touché par la pandémie de Covid-19, nous pensions que Madagascar serait en quelque sorte épargnée, du fait de son statut insulaire. En outre, le gouvernement prenait des mesures préventives.
Mais depuis lors, la gravité de la pandémie augmente, et les effets possibles de la Covid-19 dans un pays déjà pauvre sont très préoccupants. Selon la Banque mondiale, la pauvreté et la malnutrition chroniques touchent respectivement 74 % [1] et 47 %[2] de la population du pays.
Les effets immédiats de la Covid-19 ont été associés aux mesures de confinement partiel et à la cessation de presque toutes les activités économiques, éducatives et sociales, tels que la perte de revenus résultant du chômage, en particulier dans les industries de transformation alimentaire dominées par le secteur privé. Le risque d'insécurité alimentaire dans les zones rurales était élevé en raison du retour des enfants scolarisés et des travailleurs dans leurs villages, de la restriction des mouvements affectant la main-d'œuvre et les marchandises, et d'un état d'anxiété généralisé.
Les résultats préliminaires d'une étude en cours─ menée collectivement dans le cadre du Programme Politique, Systèmes d’Innovation et Évaluation d’impact d’AfricaRice pour comprendre comment les ménages ruraux en général et les agricultrices en particulier font face à la Covid-19 ─ montrent que la pandémie n'a pas eu beaucoup d'effet sur la riziculture dans les hautes terres de Madagascar.

En effet, elle a coïncidé avec la fin de la saison de culture du riz. C'est un véritable soulagement, car le riz est la culture la plus importante du pays. Les ménages agricoles qui produisent du riz pour leur propre consommation ont déclaré disposer de quantités suffisantes, et ont choisi de stocker l’excédent de riz ou même de le vendre, profitant ainsi du prix de vente élevé. Une augmentation moyenne de 200 Ariary (0,053 $US) par kg a été constatée par rapport aux prix pratiqués avant le confinement.

Les ventes d'autres cultures vivrières ont également été observées, notamment le maïs, le soja et l'arachide. Les secteurs qui ont le plus souffert sont les produits périssables, notamment les légumes tels que le chou, les tomates, les haricots verts, etc. et les produits de l'élevage tels que le lait, dont les chaînes d'approvisionnement ont subi des perturbations et par conséquent, une chute des prix ─ jusqu'à un tiers du prix appliqué avant la pandémie.

L’accès aux semences de cultures qui étaient semées, comme les pommes de terre et les haricots de contre-saison, constituait un défi majeur, de même que l'approvisionnement en aliments pour animaux et en produits phytosanitaires, car ces produits étaient devenus coûteux.
Malgré les bénéfices tirés de la vente de riz, les ménages ruraux, principalement des femmes, ont vu leurs revenus baisser considérablement, en raison de la perte financière due à la fermeture temporaire des industries de transformation alimentaire, de petites entreprises de couture, des restaurants, etc. et à l'absence de marchés.
Pour faire face à de telles situations, la plupart des ménages ont décidé de réduire la consommation de riz par habitant et de produits non agricoles tels que la viande et le poisson. Malheureusement, même sans marché, les légumes sont rarement consommés dans les ménages. Les ménages prévoient la diversification dans un avenir proche, notamment en optant pour des cultures de contre-saison, en vendant des poulets et en s'engageant dans des activités non agricoles, entre autres.
Même si les femmes ont désormais plus de temps pour elles-mêmes en partageant les tâches ménagères, elles sont surtout préoccupées par l'augmentation de la consommation du ménage due au confinement, et par l'augmentation des conflits dans certains ménages entre les jeunes et les vieux, et avec les hommes qui sortent pour parier ou boire. Parallèlement, les préoccupations sanitaires augmentent concernant les femmes enceintes, par exemple.
Sans aucun doute, avec l’allègement du confinement et l’ouverture des marchés, la situation s’améliore et les producteurs peuvent bénéficier de l’augmentation des revenus. Cependant, la lutte contre la Covid-19 n’est pas encore gagnée et sa propagation dans les zones rurales devient un grave problème.
Outre le problème sanitaire, il est nécessaire d’anticiper le risque que les semences soient consommées dans les ménages ruraux du fait de l’insécurité alimentaire grandissante. Ainsi, l’approvisionnement en semences de qualité destiné aux paysans doit être préparé dès maintenant. Il est également important de sensibiliser les ménages ruraux sur la nécessité de maintenir une alimentation riche en nutriments pour renforcer leur système immunitaire.
[1] https://www.banquemondiale.org/fr/country/madagascar/overview [2] https://www.worldbank.org/en/news/feature/2018/03/08/a-ten-year-program-to-combat-chronic-malnutrition-in-madagascar

Facing COVID-19 in the highlands of Madagascar: How are the rural households and women coping?

Contributed by Gaudiose Mujawamariya, Rice Value Chain Expert and Gender Focal Point, and Irina Andrianina Tefy, Research Assistant, AfricaRice Policy, Innovation systems and Impact Assessment Program
In early March 2020, as the world was getting increasingly hit by the COVID-19 pandemic, we thought Madagascar being an island nation would be somehow spared. In addition, the government was taking preventive measures. Between then and now however, the severity of the pandemic is increasing, and the possible effects of COVID-19 in an already poor country are deeply worrying. According to the World Bank, poverty and chronic malnutrition level respectively affect 74% [1] and 47%[2] of the population in the country.

The immediate effects of COVID-19 were associated with the partial confinement measures and closure of almost all economic, education and social activities, such as the loss of income resulting from unemployment, especially in private sector-led processing industries. The risk of food insecurity in the rural areas was high due to reverse migration of school-going children and urban workers, the restriction of movements of labor and goods and a generalized state of anxiety.
The preliminary results of an ongoing study collectively conducted in the Policy, Innovation systems and Impact Assessment program of AfricaRice to understand how the rural households in general and women farmers, in particular, are coping with COVID-19 indicate that the pandemic has not had much effect on rice cultivation in the highlands of Madagascar since it coincided with the end of the growing season.
This is quite a relief because rice is the most important crop in the country. Farming households that produce rice for their own consumption declared they had sufficient quantities and opted to store their surplus or even to sell, benefiting from the high selling price; an average increase of 200 Ariary (US$0.053) per kg was noted compared to the pre-confinement prices.
Sales of other food crops were also observed, including maize, soybean and groundnut. The sectors that suffered most were the perishable products, including vegetables such as cabbage, tomatoes, green beans, etc. and livestock products such as milk that faced disruptions in supply chains and consequently falling prices – up to one-third of the pre-pandemic price. Accessing seeds of crops that were being sown such as the off-season potatoes and beans was a major challenge as well as procuring animal feed and phytosanitary products, as these products had become expensive.
Despite the gains from the rice sales, rural households, mostly women, have seen significant declines in their incomes, from the loss of remittances due to temporary closure of processing industries, tailoring businesses, restaurants, etc., and absence of markets. To cope with such situations, most households have decided to reduce the per capita consumption of rice and of out-of-farm products such as meat and fish. Unfortunately, even without a market, vegetables are rarely consumed in the households. The households are planning to diversify in the near future, including in off-season cropping, sale of chickens and engagement in off-farm activities, among others.
While women have gained more time for themselves by sharing chores, they are mostly worried about increased household consumption due to confinement, and increased conflicts in some households between the young and the old, and men who go out for betting or drinking. At the same time, health concerns are also rising for pregnant women for instance.
Certainly, with the ease of confinement and opening of markets, the situation is improving, and farmers can benefit from income improvement. However, the battle against COVID-19 is not yet won, and its spread in the rural areas is now a serious concern. In addition to the health issue, it is necessary to anticipate the risk of seeds being consumed in rural households due to increasing food insecurity. Hence provisions of quality seeds to farmers should be prepared as of now. It is also important to sensitize rural households about the necessity of maintaining a nutrition-rich diet for boosting their immunity.

[1] https://www.banquemondiale.org/fr/country/madagascar/overview [2] https://www.worldbank.org/en/news/feature/2018/03/08/a-ten-year-program-to-combat-chronic-malnutrition-in-madagascar

Friday, May 22, 2020

AfricaRice launches new bilingual corporate website


Abidjan, Côte d’Ivoire, 22 May 2020  - In honor of the International Day for Biological Diversity (22 May), the Africa Rice Center (AfricaRice) is delighted to announce the launch of its new website (www.africarice.org) with a responsive and streamlined design, which is simple to use and navigate. Users can opt between English and French, and easily access updated information on key topics, initiatives and innovations relating to rice-based food systems in Africa.

AfricaRice is a pan-African Center of Excellence for rice research, development and capacity building. It contributes to reducing poverty, achieving food and nutrition security and improving livelihoods of farmers and other rice value-chain actors in Africa by increasing the productivity and profitability of rice-based agri-food systems, while ensuring the sustainability of natural resources.

The date of the launch was chosen to coincide with the International Day for Biological Diversity as the new website puts the spotlight on AfricaRice’s commitment to achieving the United Nations Sustainable Development Goals (SDGs) through its work. Biodiversity, which is a key factor in making our food system more sustainable, underpins many of the SDGs.

AfricaRice has been at the forefront of international efforts to collect and conserve rice genetic resources in Africa. In February 2020, the Center inaugurated the Rice Biodiversity Center for Africa (RBCA). A major component of the RBCA is AfricaRice’s new genebank, which holds the largest collection of African rice in the world and the largest rice collection in Africa.

Information on the genebank as well as a wealth of relevant resources, including scientific publications, databases and success stories, are shared on the AfricaRice website. Stakeholders, partners and interested users are invited to explore the Center’s activities and achievements through interlinked themes.

The new features on the website include information relating to research on cross-cutting global issues, such as gender, climate change, nutrition and youth employment, among others. Rice innovations for Africa developed with partners are prominently featured, including tools, technologies, agricultural equipment, models and apps. A new section on impact of AfricaRice research in Africa is presented.

“Our website is a critical component of our communications strategy,” stated AfricaRice Director General Dr Harold Roy-Macauley. “We look forward to keeping you updated on our exciting and impactful work through this new redesigned platform, which serves as a ‘front door’ to our Center for many of our partners.”

AfricaRice lance son nouveau site web bilingue


Abidjan, Côte d'Ivoire, 22 mai 2020 - Pour célébrer la Journée internationale de la diversité biologique (22 mai), le Centre du riz pour l’Afrique (AfricaRice) a le plaisir d’annoncer le lancement de son nouveau site web (www.africarice-fr.org) au design dynamique et épuré, dont l’utilisation et la navigation sont aisées. Les utilisateurs peuvent choisir entre l’anglais et le français, et accéder facilement à des informations actualisées sur des sujets, des initiatives et des innovations clés relatives aux systèmes alimentaires à base riz en Afrique.

AfricaRice est un Centre d’excellence panafricain de recherche, de développement et de renforcement des capacités dans le domaine rizicole. Il contribue à la réduction de la pauvreté, à l’atteinte de la sécurité alimentaire et nutritionnelle et à l’amélioration des moyens de subsistance des agriculteurs et des autres acteurs de la chaîne de valeur du riz en Afrique. Cette mission est possible en augmentant la productivité et la rentabilité des systèmes agroalimentaires à base riz, tout en assurant la durabilité des ressources naturelles.

La date du lancement coïncide avec la Journée internationale de la diversité biologique, car le nouveau site web met en lumière l’engagement d’AfricaRice à atteindre, grâce à ses travaux, les Objectifs de développement durable des Nations Unies (ODD). Un certain nombre de ces ODD repose sur la biodiversité, qui reste un facteur clé pour rendre notre système alimentaire plus durable.

AfricaRice a été au premier plan des efforts internationaux de collecte et de conservation des ressources génétiques du riz en Afrique. En février 2020, le Centre a inauguré le Centre de biodiversité du riz pour l’Afrique (CBRA). Une composante majeure du CBRA est la nouvelle banque de gènes d’AfricaRice, qui détient la plus grande collection de riz africain au monde et la plus grande collection de riz en Afrique.

Des informations sur la banque de gènes ainsi qu’une multitude de ressources pertinentes, y compris des publications scientifiques, des bases de données et des exemples de réussite, sont partagées sur le site web d’AfricaRice. Nos parties prenantes, nos partenaires et les utilisateurs intéressés sont invités à découvrir les activités et les réalisations du Centre à travers des thèmes interconnectés.

Les nouvelles fonctionnalités du site web incluent les informations sur des questions de portée mondiale et transversales, telles que le genre, le changement climatique, la nutrition et l’emploi des jeunes, entre autres. Les innovations rizicoles pour l’Afrique développées avec des partenaires sont mises en avant, notamment les outils, les technologies, les équipements agricoles, les modèles et les applications. Une nouvelle section sur l’impact de la recherche d’AfricaRice en Afrique est proposée.

« Notre site web est un élément essentiel de notre stratégie de communication », a déclaré Dr Harold Roy-Macauley, Directeur général d’AfricaRice. « Nous nous réjouissons à la perspective de vous tenir informés de notre travail passionnant et efficace grâce à cette nouvelle plateforme repensée, qui sert de « porte d’entrée » à notre Centre pour bon nombre de nos partenaires ».

Tuesday, April 28, 2020

STOP COVID-19 CRISIS MORPHING INTO A FOOD CRISIS : SUPPORT TO AFRICA’s RICE SECTOR

Introduction
 
CDC BY UNPLASH
The world is facing unprecedented challenges caused by the coronavirus pandemic (COVID-19), one of the most serious public health emergencies in living memory. According to the World Health Organization, as of 19 April 2020, more than 2.24 million cases of COVID-19 have been reported in 185 countries and territories, resulting in more than 152,000 deaths. The number of detected cases of infection in Africa has remained relatively low although it is now rising at an alarming rate with more than 20,000 cases and the death toll has gone past the 1,000 mark. To contain the pandemic, several measures including the maintenance of strict hygiene practices, social distancing rules, wearing of face masks, travel restrictions, quarantines and lockdowns, either partial or complete, have been implemented in many countries worldwide. 

While these measures are important to arrest the spread of coronavirus, they are, however, adversely impacting livelihoods, jobs, food and nutrition security and economic activities. The impacts are likely to be relatively huge in Africa, where 34% of the population are employed in the informal sector, earning comparatively low wages, live from hand to mouth, and do not have adequate safety nets to guarantee enough supply of food and other basic necessities for daily living. The agricultural sector provides 55% of jobs in Africa and is the source of more than 70% of the earnings of the poor. 

While experts, governments and the international community are striving hard to ‘flatten the coronavirus curve’ in order to avert unmanageable health crisis, the need to ‘flatten the food insecurity curve’, is not receiving equal attention. This is a significant concern, particularly because the last three years have witnessed a deterioration in the food security situation. The number of food-insecure people has been growing, reaching over 820 million in the world in 2018, including about 260 million in Africa. The prevalence of undernourishment in Africa is at almost 20%, the highest in the world. 

In addition, the world price of rice, which has become a major staple food in sub-Saharan Africa (SSA), has been continuously increasing over the last twelve months. The expected shortage in supply of major food items such as rice and wheat combined with rising prices, because of coronavirus measures, will likely push millions of people, especially those in Africa, into deep food insecurity and poverty. To avoid a repeat of the 2007-2008 world food crisis, necessary and urgent measures for sustained agricultural growth need to be put in place now.

The risks facing the rice sector in Africa
 
Rice is the fastest growing staple food in Africa, especially for West Africa, where it is the main source of calories compared to other cereals. The COVID-19 pandemic will certainly affect both global and local rice supplies and cause prices to fluctuate during and after the pandemic. Before COVID-19, rice consumption in SSA was projected to reach 35 million tons in 2020, out of which, 15 million tons (43%) were to be imported from Asian countries. Some of these Asian countries have been hard-hit by the pandemic and the immediate impacts of COVID-19 in SSA will be felt by rice consumers, especially in urban areas, in the form of higher prices of rice and tighter food budgets. The rice agri-food system, therefore, faces potential risks, including international market instability, increasing productivity shocks and socio-political instability.

International market instability
 
The economic consequences of COVID-9 in major rice exporting countries, such as India, Thailand, Vietnam, Pakistan, United States and Myanmar, contributing to 83% of the volume of world exports in 2017-2018, are not yet fully understood. Even if the world rice stocks increased in 2019 to 184 million tons versus 176 million tons in 2018, the stocks could fall due to the contraction of world production and increased speculation. The lockdown in many countries has seen the transportation of goods including rice being curtailed in the short term, thus resulting in a decline in rice imports into SSA. 

Asian exporting countries may also restrict exports to support domestic consumers until the end of the pandemic and when productive capacity is regained. For example, despite a clarion call in the name of solidarity to avoid ‘food nationalism’, as of 1st April 2020, Vietnam and Cambodia have decided to restrict rice export to protect their domestic market and cope with a potential food shortage. Rice traders in India, which is the world’s biggest rice exporter, had stopped signing new export contracts for three weeks in March 2020, because of labor shortages and disruptions in supply during a countrywide lockdown to control the coronavirus spread. This allowed rice-exporting countries like Thailand to increase shipments and raise global prices, forcing consumers in Africa to pay higher prices. Fortunately, Indian traders have just resumed signing new export contracts. This clearly indicates that such disruption, instability and uncertainty in supply from major exporting countries could lead to serious price spikes akin to those witnessed in the 2007-2008 global food crisis, which will certainly affect the poorest and the most vulnerable people in Africa.

Increasing rice productivity shocks
 
Consumer prices will be hiked by potential disruptions in domestic markets of inputs (seed, fertilizer), resulting in low use of inputs and low domestic production of rice. In some countries, farmers may not be allowed to go to farm or find laborers for farm activities resulting in reduction of domestic rice production. Access to output market could also be a challenge due to lockdown. The recent investigation of countries’ rice self-sufficiency status by AfricaRice has shown that countries like Gambia, Cameroon, Ghana or Senegal have self-sufficiency ratios of 60% or less. Price shocks will therefore be more severe for these countries as they are still largely dependent on Asian exports to meet the gaps between production and consumption. 

In the medium-term and contrary to the expectation that higher prices should benefit farmers, farm incomes of smallholder rice farmers will probably be eroded by the risk and uncertainty created by price volatility and reduced production. The shortcoming in the inputs production systems will even upset the nearly self-sufficient countries with high per capita consumption such as Madagascar, Mali or Sierra Leone, where in addition to reduced rice stocks in markets, farmers may also consume all their rice stocks including seeds. This situation was observed during the Ebola crisis in West Africa. Post the COVID-19 crisis, it is thus expected that the production system will, by all means be affected negatively, considering the existing challenges in the development of the rice sector in SSA, including the limited availability of adequate germplasm and seed capitals, as well as poorly functioning seed systems, lack of investment and long-term policy measures, and weak agricultural credit and insurance system. Technology transfer and access to improved practices could slow down due to the inactivity of the national extension agencies, which will be compelled to slow down their activities or even shut down as a result of the spread of the COVID-19.

Social and political instability
 
This pandemic would also affect the human capital, the worst-case scenario being a high rate of deaths, depending on the capacities of countries in maintaining control over their borders and applying social distancing measures. Poor countries in Africa have the least resources to prevent and control health problems; medical services, electricity and potable water sources are seriously lacking. If COVID-19 is not contained, it will take a serious toll on rural people thus reducing the number of workers and leaving the younger generation with limited knowledge on farming. This scenario will negatively affect the local rice agri-food system supply and lead to price increase. 

Failure to appease the needs of the population through emergency food distribution systems by governments during the pandemic could lead to potential social unrest – a stark reminder of the  demonstrations and food riots that took place in some of the capitals of SSA in response to high food prices during the 2007-2008 food crisis. The political instability could also be fueled by the increase in youth unemployment due to lay-offs by small and medium enterprises (SMEs), which are  struggling  to survive the economic fallout from the coronavirus pandemic and by the reduction in demand for goods and services from rice-related supply chains in which the youth are engaged.

Flattening the food insecurity curve through effective interventions to support the rice agri-food system in the face of COVID-19
 
The prevailing context should serve as a renewed incentive and justification for Africa to increase its production of rice to feed its population. The experience of the 2007-2008 global economic downturn showed that most developing countries rebounded with an uneven and short-lived recovery; trends in economic growth, since 2011, generally declined and the number of undernourished people over the last three years increased. In the current situation and given the role the rice sector could play to attenuate the negative effects of the COVID-19 pandemic on food security, the following measures are suggested:


Short term measures

  1. Subsidize and control the retail prices to contain the increase in consumer prices and avoid riots; 
  2. Undertake a quick inventory and monitoring of rice stocks (local and imported) in countries and stabilize prices by preventing speculative behavior deemed to increase prices;
  3. Promote regional trade by taking advantage of the existing regional trading blocs and free trade agreements;
  4. Avoid food waste, reduce post-harvest losses 
  5. Stimulate domestic production through subsidies on inputs such as seed and fertilizer, farm machinery and post-harvest equipment;
  6. Establish minimum producer price and ensure the availability of fertilizer and quality seed on time;
  7. Rule out measures of reduction or suspension of tariffs on imported rice due to their negative incentive on local production;
  8. Implement an economic recovery program that includes extending fiscal debts and public utilities payments to enable private sector to limit youth unemployment.
Medium- and long-terms measures
  1. Strengthen the key investment areas for the development of the rice value chain; promote local rice; support national and international research for development to close the yield gap; scale out good agricultural practices; ensure accessibility of quality seed; improve water control through new irrigation schemes and lowland development; rehabilitate  degraded irrigation schemes; and develop basic infrastructure for postharvest processing, marketing and improve competitiveness.
  2. Given that the extension services and farm labor would be affected by the quarantine restrictions, it is high time to develop and promote the use of digital and ICT technologies to provide services and improve labor and land productivity;
  3. Promote digital innovations through investment in digital infrastructure to provide incentives for creating dynamic, good quality and stable employment opportunities for the youth in the rice value chain;
  4. Consolidate regional and national rice reserve stocks as rice has the advantage to be stored for a relatively longer time and easily used in emergency situations.
Conclusion

It is the time for governments to embrace an agri-food systems approach to research-for-development, policy formulation and implementation, considering that the pandemic is not affecting rice alone but also many other food commodities, all the processes, actors, relationships and institutions involved in food production, marketing and consumption.

As the lead rice research and development institute in Africa, AfricaRice is mandated to help its member countries mitigate the impacts of the COVID-19 pandemic on their rice agri-food system, by making available  quality seed and other improved technologies working hand in hand with the public and private sectors, monitoring rice market trends and offering advice and guidance to policymakers.

EVITER QU’UNE CRISE COVID-19 SE MUE EN CRISE ALIMENTAIRE: APPUI AU SECTEUR RIZICOLE EN AFRIQUE



Introduction

Le monde est confronté à des défis sans précédent causés par la pandémie de coronavirus (COVID-19), l’une des plus graves urgences de santé publique de l’histoire. Selon l’Organisation mondiale de la santé, au 19 avril 2020, plus de 2,24 millions de cas de COVID-19 ont été signalés dans 185 pays et territoires, entraînant plus de 152 000 décès. Le nombre de cas d’infection détectés en Afrique est resté relativement faible, bien qu’il augmente maintenant à un rythme alarmant avec plus de 20 000 cas et le nombre de décès qui a dépassé le millier. Pour contenir la pandémie, plusieurs mesures, dont le maintien de pratiques d’hygiène strictes, des règles de distanciation sociale, le port de masques faciaux, des restrictions de voyage, des quarantaines et des mesures de confinement partielles ou complètes, ont été mises en œuvre dans de nombreux pays du monde.

Si ces mesures sont importantes pour arrêter la propagation du coronavirus, elles ont cependant un impact néfaste sur les moyens de subsistance, l’emploi, la sécurité alimentaire et nutritionnelle et les activités économiques. Les impacts seront probablement relativement importants en Afrique, où 34 % de la population est employée par le secteur informel, gagne des salaires relativement bas, vit au jour le jour et ne dispose pas de filets de sécurité adéquats pour garantir un approvisionnement suffisant en nourriture et autres produits de première nécessité pour la vie quotidienne. Le secteur agricole fournit 55 % des emplois en Afrique et est la source de plus de 70 % des revenus des populations pauvres.

Alors que les experts, les gouvernements et la communauté internationale s'efforcent « d’aplatir la courbe du coronavirus » afin d’éviter une crise sanitaire ingérable, la nécessité « d’aplatir la courbe de l’insécurité alimentaire » ne reçoit pas la même attention. Il s’agit d’une préoccupation importante, notamment parce que les trois dernières années ont déjà vu une détérioration de la situation de la sécurité alimentaire. Le nombre de personnes souffrant d’insécurité alimentaire a augmenté, atteignant plus de 820 millions dans le monde en 2018, dont environ 260 millions en Afrique. La prévalence de la sous-alimentation en Afrique est de près de 20 %, soit la plus élevée au monde.

En outre, le prix mondial du riz, qui est devenu un aliment de base majeur en Afrique subsaharienne (ASS), n’a cessé d’augmenter au cours des douze derniers mois. La pénurie attendue de denrées alimentaires importantes telles que le riz et le blé, combinée à la hausse des prix, en raison des mesures de lutte contre le coronavirus, va probablement plonger des millions de personnes, en particulier en Afrique, dans une profonde insécurité alimentaire et dans la pauvreté. Pour éviter une répétition de la crise alimentaire mondiale de 2007-2008, des mesures nécessaires et urgentes pour une croissance agricole soutenue doivent être mises en place dès maintenant.

Risques auxquels est confronté le secteur rizicole en Afrique

Le riz est l’aliment de base qui croît le plus rapidement en Afrique, en particulier en Afrique de l’Ouest, où il est la principale source de calories par rapport aux autres céréales. La pandémie de COVID-19 affectera certainement l’offre mondiale et locale en riz et fera fluctuer les prix pendant et après la pandémie. Avant la crise à COVID-19, la consommation de riz en ASS devait atteindre 35 millions de tonnes en 2020, dont 15 millions de tonnes (43 %) devaient être importées des pays asiatiques. Certains de ces pays asiatiques ont été durement touchés par la pandémie et les effets immédiats du COVID-19 en ASS seront ressentis par les consommateurs de riz, en particulier dans les zones urbaines, sous la forme d’augmentation du prix du riz et de budgets alimentaires plus serrés. Subséquemment, le système agroalimentaire riz est confronté à des risques potentiels, notamment l’instabilité du marché international, les chocs croissants sur la productivité et l’instabilité sociopolitique.

Instabilité du marché international

Les conséquences économiques du COVID-19 dans les principaux pays exportateurs de riz, tels que l’Inde, la Thaïlande, le Vietnam, le Pakistan, les États-Unis et le Myanmar, qui a contribué à hauteur de 83 % au volume des exportations mondiales en 2017-2018, ne sont pas encore pleinement comprises. Même si les stocks mondiaux de riz ont augmenté en 2019 pour atteindre 184 millions de tonnes contre 176 millions de tonnes en 2018, les stocks pourraient diminuer en raison du repli de la production mondiale et de l’augmentation de la spéculation. Le blocage dans de nombreux pays a entraîné une réduction à court terme du transport de marchandises, notamment du riz, ce qui peut aboutir à une baisse des importations de riz en ASS.

Les pays exportateurs asiatiques pourraient également restreindre leurs exportations pour soutenir la consommation nationale jusqu’à la fin de la pandémie et lorsque la capacité de production sera rétablie. À titre d’exemple, malgré un appel à la solidarité pour éviter le « nationalisme alimentaire », à partir du 1er avril 2020, le Vietnam et le Cambodge décidaient de restreindre les exportations de riz pour protéger leur marché intérieur et pour faire face à une éventuelle pénurie alimentaire. Les commerçants de riz en Inde, qui est le plus grand exportateur de riz au monde, avaient cessé de signer de nouveaux contrats d’exportation pendant trois semaines en mars 2020, en raison de pénuries de main-d’œuvre et de perturbations dans l’approvisionnement lors d'un confinement sur l’étendue du territoire pour contrôler la propagation du coronavirus. Cela a permis aux pays exportateurs de riz comme la Thaïlande d’augmenter les expéditions et ce qui a fait grimper les prix mondiaux, obligeant les consommateurs africains à payer plus cher pour cette denrée. Heureusement, les commerçants indiens viennent de reprendre la signature de nouveaux contrats d’exportation.

Cela indique clairement qu’une telle perturbation, instabilité et incertitude dans l’approvisionnement en provenance des principaux pays exportateurs pourraient entraîner de graves pics de prix semblables à ceux observés lors de la crise alimentaire mondiale de 2007-2008, qui vont affecter plus les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables en Afrique.

Augmentation des chocs sur la productivité du riz

Les prix à la consommation augmenteront du fait des perturbations potentielles sur les marchés intérieurs des intrants (semences, engrais), ce qui entraînera une faible utilisation des intrants et une faible production locale de riz. Dans certains pays, les agriculteurs peuvent ne pas être autorisés à aller au champ ou à trouver de la main-d’œuvre pour les activités agricoles, ce qui va entraîner une réduction de la production nationale de riz. L’accès au marché de produits pourrait également constituer un défi en raison du confinement. La récente étude menée par AfricaRice, sur le niveau d’autosuffisance en riz des pays, a montré que des pays comme la Gambie, le Cameroun, le Ghana ou le Sénégal ont des taux d’autosuffisance de 60 % ou moins. Par conséquent, les chocs des prix seront plus graves pour ces pays, car ils dépendent encore largement des exportations en provenance d’Asie pour combler les écarts entre la production et la consommation.

À moyen terme et contrairement à la perception selon laquelle la hausse des prix devrait profiter aux agriculteurs, les revenus agricoles des petits riziculteurs seront probablement réduits par le risque et l’incertitude créés par la volatilité des prix et la réduction de la production. Les insuffisances des systèmes de production d’intrants vont même bouleverser les pays presque autosuffisants dont la consommation par habitant reste forte notamment Madagascar, le Mali ou la Sierra Leone, où, en plus des stocks de riz réduits sur les marchés, les agriculteurs peuvent aussi consommer tous leurs stocks de riz, y compris les semences. Cette situation a été déjà constatée lors de la crise à virus Ebola en Afrique de l’Ouest.

Après la crise à COVID-19, il est attendu que le système de production soit, certainement, affecté négativement, compte tenu des défis existants du développement du secteur rizicole en ASS, notamment la disponibilité limitée des matériaux génétiques adéquats et de capitaux semenciers, ainsi que des systèmes semenciers dysfonctionnels, le manque d’investissements et de mesures politiques à long terme, et la faiblesse du système de crédit et d’assurance destinés aux agriculteurs. Le transfert de technologies et l’accès à des pratiques améliorées pourraient ralentir en raison de l’inactivité des agences nationales de vulgarisation, qui seront obligées de ralentir leurs activités, voire de les arrêter en raison de la propagation du COVID-19.

Instabilité sociale et politique

Cette pandémie affecterait également le capital humain, le pire scénario étant un taux élevé de décès, en fonction des capacités des pays à maintenir le contrôle de leurs frontières et à appliquer les mesures de distanciation sociale. Les pays pauvres d’Afrique sont ceux qui ont le moins de ressources pour prévenir et contrôler les problèmes de santé ; les services médicaux, l’électricité et les sources d’eau potable font cruellement défaut. Si le COVID-19 n’est pas contenu, il fera payer un lourd tribut aux populations rurales, ce qui réduira le nombre de travailleurs et laissera la jeune génération avec des connaissances limitées en matière d’agriculture. Ce scénario aura un effet néfaste sur l’approvisionnement du système agroalimentaire local en riz et entraînera une hausse des prix.

L'incapacité des gouvernements à répondre aux besoins de la population par des systèmes de distribution alimentaire d’urgence pendant la pandémie pourrait entraîner des troubles sociaux potentiels. Ce qui constituerait un rappel brutal des manifestations et des émeutes alimentaires qui ont eu lieu dans certaines des capitales d’ASS en réponse aux prix élevés des denrées alimentaires pendant la crise alimentaire de 2007-2008. L’instabilité politique pourrait également être aggravée par l’augmentation du chômage des jeunes du fait : des licenciements dans les petites et moyennes entreprises (PME), qui luttent pour survivre aux effets de la crise économique issus de la pandémie de coronavirus, et de la réduction de la demande de biens et services des chaînes d’approvisionnement liées au riz dans lesquelles les jeunes sont employés.

Aplatir la courbe de l’insécurité alimentaire par des interventions efficaces pour appuyer le système agroalimentaire du riz face au COVID-19

Le contexte actuel devrait servir d’incitation et de justification renouvelée à l’Afrique pour qu'elle augmente sa production rizicole afin de nourrir sa population. L’expérience du ralentissement économique mondial de 2007-2008 a montré que la plupart des pays en développement ont rebondi avec une reprise inégale et de courte durée. Depuis 2011, les tendances de la croissance économique ont généralement diminué et le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation a augmenté au cours des trois dernières années. Dans la situation actuelle, et compte tenu du rôle que le secteur rizicole pourrait jouer pour atténuer les effets néfastes de la pandémie de COVID-19 sur la sécurité alimentaire, les mesures suivantes sont proposées :

Mesures à court terme
  1. Subventionner et contrôler les prix au détail pour contenir l’augmentation des prix à la consommation et éviter les émeutes ;
  2. Entreprendre un inventaire et un suivi rapides des stocks de riz (local et importé) dans les pays et stabiliser les prix en empêchant les comportements spéculatifs censés faire augmenter les prix ;
  3. Promouvoir le commerce régional en tirant parti des blocs commerciaux régionaux et des accords de libre-échange existants ;
  4. Éviter le gaspillage de nourriture, réduire les pertes post-récolte ;
  5. Stimuler la production nationale en subventionnant les intrants tels que les semences et les engrais, les machines agricoles et les équipements post-récolte ;
  6. Fixer un prix minimum au producteur et assurer la disponibilité d’engrais et de semences de qualité en temps opportun ;
  7. Exclure les mesures de réduction ou de suspension des taxes douanières sur le riz importé en raison de leur effet négatif sur la production locale ;
  8. Mettre en œuvre un programme de relance économique qui comprend l’extension des dettes fiscales et des paiements des services publics pour permettre au secteur privé de limiter le chômage des jeunes.

Mesures à moyen et long termes
  1. Renforcer les principaux domaines d’investissement pour développer la chaîne de valeur du riz, promouvoir le riz local, soutenir la recherche nationale et internationale pour le développement afin de combler l'écart de rendement, diffuser à grande échelle les bonnes pratiques agricoles, assurer l’accessibilité aux semences de qualité, améliorer la maîtrise de l’eau grâce à de nouveaux périmètres irrigués et à l’aménagement des bas-fonds, réhabiliter les périmètres d’irrigation dégradés, et développer les installations de base pour la transformation post-récolte, la commercialisation et l’amélioration de la compétitivité ;
  2. Étant donné que les services de vulgarisation et la main-d'œuvre agricole seraient affectés par les restrictions liées à la quarantaine, il est grand temps de développer et de promouvoir l’utilisation des technologies numériques et des TIC pour fournir des services et améliorer la productivité du travail et des terres ;
  3. Promouvoir les innovations numériques en investissant dans les infrastructures numériques afin d’encourager la création d'emplois dynamiques, stables et de bonne qualité pour les jeunes dans la chaîne de valeur du riz ;
  4. Consolider les stocks de réserve régionaux et nationaux de riz, car l’avantage du riz est qu’il peut être stocké pendant une période relativement longue et être facilement utilisé dans les situations d'urgence.

Conclusion

Il est temps que les gouvernements adoptent une approche agroalimentaire systémique en ce qui concerne la recherche pour le développement, la formulation et la mise en œuvre des politiques, étant donné que la pandémie n’affecte pas seulement le riz mais aussi de nombreuses autres denrées alimentaires, tous les processus, les acteurs, les relations et les institutions impliqués dans la production, la commercialisation et la consommation alimentaires.

En tant que principal institut de recherche pour le développement rizicole en Afrique, AfricaRice est chargée d’aider ses pays membres à atténuer les effets de la pandémie de COVID-19 sur leur système agroalimentaire riz, en mettant à disposition des semences de qualité et d’autres technologies améliorées en travaillant en étroite collaboration avec les secteurs public et privé, en suivant les tendances du marché du riz et en offrant des conseils et des orientations aux décideurs politiques.